La question peut sembler provocante et la réponse aller de soi, alors que la famille est régulièrement citée comme la valeur à laquelle les Français accordent la plus grande importance. La réalité à laquelle renvoie cet attachement est cependant très incertaine, ne serait-ce qu'en raison de la polysémie du terme « famille », dont la définition reste un enjeu des débats contemporains. Il conviendrait par ailleurs de se demander si l'attachement à la famille ne serait pas seulement un attachement au bonheur domestique - qui pourrait, probablement, se concevoir sans famille.
C'est en partant des diverses fonctions qu'est susceptible d'assurer la famille que l'on peut se faire une idée de ce que recouvre le besoin de famille. À l'évidence, ces fonctions sont très diverses : espace de construction de l'individu, source de normes, lieu de la transmission intergénérationnelle - en particulier de la transmission des biens - et, sur un tout autre plan, matière de la littérature.
Est-on alors certain que toutes ces fonctions fassent l'objet d'un consensus ? Comment, par exemple, interpréter les évolutions des modèles familiaux - on songe à l'apparition de nouveaux modes de conjugalité, comme le pacte civil de solidarité, ou aux revendications d'accès au mariage ou à la parenté par les couples de personnes de même sexe ? S'agit-il d'exprimer un besoin renouvelé de famille ou au contraire une volonté de faire sans famille, en privilégiant les liens interindividuels sans référence à une quelconque entité collective ? Peut-on voir dans la famille le lieu de l'épanouissement de l'individu lorsque le groupe cache à certains de ses membres ou aux entités extérieures des secrets essentiels, ou lorsque le heurt entre valeurs du groupe familial et valeurs du groupe social empêche l'individu de trouver sa place dans l'un ou l'autre de ceux-ci - sinon les deux ?
En somme, le besoin de famille ne saurait être posé comme une évidence et les sciences humaines et sociales permettent d'en clarifier les termes et les approches. Au-delà, se pose la question de l'utilité de la famille en tant que catégorie d'analyse pour appréhender les phénomènes sociaux.
Dans le cadre du premier printemps des sciences humaines et sociales de la Maison européenne des sciences de l'homme et de la société, des spécialistes de multiples disciplines ont accepté de réfléchir à la question en rendant leurs recherches accessibles au plus grand nombre.
Quatre semaines, 9 rencontres, 17 conférenciers couvrant une grande partie des disciplines des sciences humaines, le Printemps des Sciences humaines et Sociales organisé par la MESHS propose un examen large et structuré de la question: A-t-on encore besoin de la famille ?
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